Korité 2013 : 10 000 moutons abattus au Seras de Dakar
A quelques heures de la Korité, le célèbre abattoir dakarois bat son plein. Hier, des milliers de personnes se sont rendues à Séras, pour s’approvisionner en viande ou se payer les services d’un «abatteur». C’est dans la boue, la saleté…des conditions parfois difficiles pour accéder à Séras, mais qui ne découragent point les clients.
«Tous les chemins mènent à Séras où plus de dix (10) mille moutons seront abattus, aujourd’hui. Et, si la Korité est programmée pour Vendredi, c’est le triple qui sera abattu». Ces mots sortent de la bouche d’un chevillard réputé qui travaille à Séras depuis 25 ans. Hier mercredi, Séras a sorti ses meilleurs couteaux pour accueillir les Dakarois venus chercher de la bonne chair. A l’intérieur de la salle des ventes, on se croirait dans un film d’horreur. Le sang est visible partout sur le sol, le bruit des sabres résonne dans tous les coins… Les hommes, tenues imbibées de sang se baladent couteaux à la main. Une odeur ignoble se dégage. Pour différentes raisons, le lieu reste la préférence des consommateurs. «C’est l’embarras du choix qui m’attire à Séras.
Et, j’ai la possibilité de veiller sur ma marchandise», dit Amy Guèye. Assise sur le long banc qui fait face à la petite porte du parking. Amy garde jalousement ses «Kilos» de viande, bien remballés dans un sac qu’elle dit payer à 1000 FCfa. La distance entre les Parcelles Assainies (Dakar) et Séras ne la décourage point. Et, elle a une bonne raison de choisir Séras. «J’achète le Kilo de la viande à 2 200 FCfa. Contrairement aux Parcelles où j’achète à 2 500 FCfa. Tout est moins cher, ici (Séras) et je me paye un garçon pour découper le mouton à 1 000 FCfa», souffle Amy. Les nombreux inconditionnels de Séras n’en disent pas moins de ce qu’a appris Amy Guèye. Beaucoup sont des habitués des lieux. Comme si tous les chemins menaient dans ce vaste magasin de charcuterie à ciel ouvert. Ici, le mot d’ordre reste : «C’est moins cher.» Même si certaines comme Angélina, une jeune dame constate une légère hausse. «L’année dernière, j’ai acheté un mouton à 25 000 FCfa. Cette année, je me suis procuré le mouton déjà dépecé à 35 000 FCfa.» Angélina qui est moulée dans un ensemble taille-basse vert dit porter des sandales, parce que Séras est trop sale.
La saleté, la tare de Séras
A Séras, un autre problème se pose. «L’endroit est nettoyé, chaque soir, grâce aux taxes que nous payons à 650 FCfa pour chaque tête de mouton», informe Laye Sow, vendeur de Viande à Séras. Pour les abatteurs, chevillards et autre travailleurs, les nombreux syndicats qui existent à Séras constituent «la tache de sang de trop» entre eux et l’Etat. «Nous sommes les patrons. Il n’y a qu’un seul Séras. Si l’on avait vraiment la volonté, Séras serait transformé en Château», fait savoir Mansour Mbaye Madiaga, le ton haut. Son voisin de palier Yankhoba Cissé acquiesce pour enfoncer le clou : «Regarder la porte d’entrée, n’importe qui entre à l’intérieur de la salle des ventes. Il n’y a pas de contrôle. Cet endroit doit être vraiment organisé.» L’homme est chevillard et dispose de sa «place» à Séras depuis 20 ans. Sur l’augmentation du prix de la viande, Yankhoba Cissé fait remarquer que cette hausse ne dépend pas des chevillards encore moins des vendeurs de viande. «Le bœuf est devenu cher, on paye l’abattage à 10 000 FCfa ou à 30 000 FCfa. Cela dépend de la taille du bœuf.»
A Séras, tout le monde semble trouver son compte. Tout va à la vitesse supérieure. La dernière ligne droite avant Aïd-el-Fitr impose un changement d’horaire. Les travailleurs sont devenus de véritables «noctambules». Sabre à la main, Soulèye Sow, sourire de commercial comme beaucoup des vendeurs de viande rôdent et interpellent les passants pour les attirer dans ses «filets», «depuis hier, à 2h du matin, je ne suis pas retourné chez moi. Je vais maintenir le rythme jusqu’à la fin de la Korité. Même son de cloche chez Madiaga : «Ma famille m’apporte les repas et des habits de rechange, je passe la nuit à Séras.» Comme si la vie ne s’arrêtait jamais à Séras…
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