Lettre ouverte à la diaspora sénégalais, lettre ouverte au régime de benno bokk yaakaar pour des élections régulières et transparentes
Le Sénégal se situe aujourd’hui à la croisée des chemins. Notre peuple, qui a réussi deux alternances démocratiques mais sans alternative véritable, est confronté à une échéance cruciale, celle du dimanche 24 février 2019. Une situation de grande incertitude assurément, si nous gardons en mémoire les dernières élections législatives de juillet 2017, particulièrement chaotiques dans les grandes villes défavorables au pouvoir en place. Si nous n’y prenons garde, la présidentielle à venir risque d’être le scrutin de tous les dangers, au vu de la volonté affichée de l’Etat-Parti APR-BBY de s’octroyer coûte que coûte un second mandat. Les mises en garde répétées de l’opposition et les belliqueuses assurances données par le pouvoir confortent les craintes de nombre de nos compatriotes.
« Dara du am » (« Rien ne se passera »), « Force restera à la loi », « Aucune force politique ne peut déstabiliser ce pays » sont les propos favoris de nos gouvernants et de leurs supporters. Ce qui n’augure rien de bon car ces menaces à peine voilées ne sauraient aucunement remplacer un processus transparent, inclusif fait de concertations sincères, de large consensus, de cartes d’électeurs données à temps, avec la possibilité d’accéder au fichier électoral dès la période du parrainage. Est-ce trop demander pour notre peuple, où ce dernier ne le mérite-t-il pas ?
Malheureusement, force est de constater que nous sommes très loin du compte et deux faits majeurs empêchent les Sénégalais d’être optimistes :
1- L’instrumentalisation à tout-va de la justice par le pouvoir, devenue le sentiment le mieux partagé au Sénégal. D’ailleurs, les voix les plus averties viennent de l’intérieur même des institutions avec les magistrats eux-mêmes qui réclament l’indépendance de la justice. C’est aussi au Sénégal qu’un ministre de la République refuse catégoriquement de matérialiser une décision de la Cours suprême, avec le soutien du président de la République lui-même. Tandis que nos plus hautes institutions judiciaires, lorsqu’elles ne se considèrent pas incompétentes, tranchent systématiquement en défaveur des opposants, quand ce n’est pas le même président de la République lui- même qui affirme volontiers « mettre sous le coude » les dossiers des « épinglés » de son camp ainsi que des transhumants politiques qui l’ont rejoint, alors qu’il « accélère la cadence » du traitement des dossiers de ceux de ses adversaires. C’est pourquoi, plus personne ne s’étonne de ne voir que des opposants dans nos prisons car les enquêtes sont commanditées par le « gardien de la Constitution » qui en reçoit aussi les conclusions et les traite selon ses intérêts et son agenda personnel. Comme pour ne pas nous rassurer, des célébrités ayant maille à partie avec notre justice se retrouvent avec des « libertés provisoires définitives » alors qu’à côté, les jeunes de Colobane arrêtés depuis 2012 sont restés en prison pendant plusieurs longues années. Et que dire du jeune élève Saer KEBE encore en prison pour avoir fait un commentaire sur Facebook en 2015 s’offusquant des bombardements israéliens meurtriers contre les populations civiles de Gaza ? Quant au traitement du décès de l’étudiant Fallou SENE de l’Université Gaston Berger de Saint Louis, il ressemble plus à un Etat qui a cassé sa tirelire pour éviter de rendre justice en toute rigueur. Bref, le règne de l’impunité des crimes économiques et de sang. L’environnement sécuritaire devient de plus en plus inquiétant avec les récentes descentes musclées des forces de sécurité au siège d’un parti d’opposition et au domicile de son leader à Ziguinchor, les menaces de dissolution d’un parti de l’opposition « pour rébellion politique » et l’assassinat récent d’une opposante politique à Keur-Massar même si le mobile du crime reste encore inconnu.
2- La recolonisation française rampante de notre pays qui est un sérieux coup de canif à notre fierté nationale. Avec l’avènement d’un président né après les indépendances, nous caressions quasiment tous l’espoir de rompre définitivement avec les stigmates du colonialisme. Malheureusement, nous nous sommes retrouvés avec un adepte d’un néocolonialisme décomplexé qui veut nous ôter jusqu’au droit de poser le problème du Franc CFA comme une question de dignité et de souveraineté nationale avant tout. C’est-à-dire : d’avoir notre propre monnaie et la gérer nous-mêmes comme un peuple majeur, non pas avec une « considération politicienne », mais bel et bien une optique « de lutte anticoloniale ». N’en déplaise au « premier des Sénégalais » ! Les avancées dans les luttes contre les Accords de Partenariat Economique (APE) ont été mises en pièces par le tandem Ouattara-Sall. Ce qui ouvre grandement la porte aux produits européens et nous renvoie à une situation que les Européens caricaturaient, jadis, comme « la liberté du renard dans le poulailler ». Coopérer autrement, c’est assurément refuser le compagnonnage entre le cavalier et le cheval. Dans le Sénégal d’aujourd’hui, évoquer les contrats gaziers et pétroliers déjà signés, équivaut à parler de corde dans la maison d’un pendu. La virulence des menaces des tenants du pouvoir n’a d’égale que l’opacité dans laquelle ces contrats sont couverts. Alors, il n’est pas étonnant que les principaux partis de l’opposition n’aient donné aucun crédit à l’appel sur le tard à la concertation sur le pétrole et le gaz, qui met sous silence les contrats déjà signés, fortement contestés et peut-être sources de grands scandales ? Scandales qui puent l’odeur de la françafrique avec la rentrée fracassante du major français, Total. Cependant, une constante reste de rigueur, les sociétés françaises qui se servent sans retenue. Si ce n’est pas Eiffage avec son autoroute de la honte, c’est Alstom avec son Train Express Régional (TER) au coût pharaonique alors qu’Auchan est en train d’asphyxier les petits commerçants sénégalais. Qu’en est-il de la position de l’actuel régime par rapport aux bases françaises et même américaine et quel rôle auront-elles en cas de fortes contestations post-électorales ?
Compte tenu de tout ce qui précède, nous ne doutons nullement que les patriotes sincères aspirent profondément à rompre avec des alternances qui n’engendrent que désillusions et déceptions, à la manière d’un cercle vicieux qu’il est temps de remplacer par un cercle vertueux porteur d’alternatives crédibles.
Mais cela passe par des élections fiables et transparentes ou par une riposte à la mesure des forfaitures préparées. Avec tout ce que le pouvoir doit avoir à se reprocher, tout ce qu’il cache aux citoyens et tous les individus qu’il tient à protéger, il ne reculera devant rien pour s’accrocher désespérément, y compris par la violence dont notre peuple ne veut certainement pas. Mais, il doit aussi être clair que ce peuple-là n’a pas peur de résister.
Une telle situation interpelle tous les Sénégalais épris de justice et de paix qui ont pour devoir de se dresser contre la volonté de confiscation du pouvoir par le régime en place et leurs soutiens extérieurs. La diaspora sénégalaise ne saurait être en reste face à ces exigences patriotiques à l’instar de celle du Canada qui a déjà fait subir à la majorité présidentielle un grand camouflet, notamment lors des dernières législatives, ce qui constitue pour tous les démocrates et patriotes une grande source d’inspiration.
Dressons-nous contre la volonté de confiscation du pouvoir !
Réclamons des élections régulières et transparentes !
Vive le peuple sénégalais !
Fait le 14 Octobre 2018
Comité de citoyens Sénégalais résidant dans les villes suivantes :
Drummondville, Fuerteventura, Grenoble, Grenville, Hopewell, Las Palmas, Longueil, Manchester, Montréal, New York, Toronto, Ottawa, Québec, Sherbrooke, Washington
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