Bombardier : «Battre Balla Gaye n’est pas difficile»

L’OBS – La conquête du titre de roi des arènes réussit bien à Bombardier. Comme en décembre 2002 quand il a détrôné Tyson, Bombardier a remis ça dimanche dernier. Contre toute attente, le B52 de Mbour a renversé le roi Balla Gaye 2 en 2 mn. Quelques coups de poing et un placage ont suffit au B52. C’est dans ses habits de roi des arènes que le B52 nous a accordé cet entretien. 
Qu’est-ce que ça fait de retrouver la couronne 10 ans après ?

Afin c’est une surprise pour les amateurs, mais pas pour moi. J’ai toujours cru que tôt ou tard cette couronne allait me revenir. J’ai toutes les qualités pour reconquérir le trône. C’est pourquoi, malgré les déconvenues, j’ai continué à bosser dur. Ce succès est grand, mais il ne me dépasse pas. Quand je disais que la couronne me reviendrait un jour, certains m’ont cru et d’autres ont pensé que je ne pouvais pas rebondir. Quand je disais cela, j’étais encore dans une période sombre. J’ai mis du temps pour revenir au sommet. Après  avoir perdu face à Yekini, j’ai cumulé des défaites. C’est cette série noire qui m’a un peu retardé. J’ai pris mon mal en patience. Je me suis donné les moyens de revenir.

Sincèrement, est-ce que vous aviez cru un seul instant pouvoir terrasser Balla Gaye 2 ?

Battre Balla Gaye n’est pas difficile. J’ai pris le temps de le connaître. Je le lui ai dit, mais il ne pouvait pas comprendre. Les amateurs de lutte ont analysé le combat en fonction de la différence d’âge (Balla Gaye 29, Bombardier 38 ans). On a dit que c’est la jeunesse face à l’expérience. Mais les gens ont oublié que quand on a l’expérience, on s’en sort plus facilement face à la fougue de la jeunesse. Ma stratégie était de rester calme, de donner beaucoup de respect et à la limite donner l’impression d’avoir peur de Balla Gaye 2. Dans mon for intérieur, je savais que c’était mon jour. J’ai retrouvé les repères que j’avais perdus. J’ai tout pour être le roi des arènes : la force, la mentalité, l’âge…

Pourtant,  vous avez peiné à reprendre votre couronne des mains de Yékini ?

La lutte est complexe. Après avoir perdu la couronne, je n’avais plus mes repères. Les défaites ne me lâchaient pas. Si je n’étais pas fort mentalement, je n’allais pas revenir en force. Je ne pouvais pas reprendre ma couronne sur Yékini parce que ce n’était pas le moment. Ce que les gens ne savent pas c’est que la position de roi est la plus difficile dans l’arène. Vous êtes l’homme à abattre par tous les prétendants au trône. Et tous ceux qui lorgnent votre fauteuil vont chercher à vous atteindre sur tous les plans. C’est très difficile de rester longtemps au trône. J’ai goûté aux délices du titre de roi,  puis je me suis retrouvé dans le trou. Maintenant que je suis de retour, je saurai où mettre les pieds.

A quel moment avez-vous cru à la victoire face à Balla Gaye 2 ?

Depuis toujours. Bien avant de donner mon accord au promoteur. Je ne prends jamais d’avance si je ne suis pas convaincu de pouvoir battre l’adversaire. Dans ce combat, j’ai tout entendu. Tous les pronostics étaient contre moi. Même Balla s’est perdu dans ses calcules. Il a dit qu’il a battu des lutteurs qui m’ont terrassé donc je n’ai aucune chance devant lui. Ce qu’il ne sait pas c’est que les adversaires ne sont pas les mêmes. Il a battu Tyson et Tapha Guèye qui ont perdu devant moi. Ce qu’il ne savait pas c’est que la lutte est tellement complexe qu’on ne peut pas se permettre d’établir une logique.

Avant le combat, j’ai dit à mon staff que si l’affiche est ficelée tout le monde dira qu’il est favori. Et en ce moment, le combat va se gagner psychologiquement. Effectivement, l’histoire m’a donné raison. En sport, il faut toujours se méfier du supposé plus faible. Personnellement, je n’aime pas être favori. La position de challenger me pousse à me surpasser. Lors de notre premier face-à-face, j’avais dit qu’il faut qu’on arrête de dire à un lutteur qu’il est plus fort que son adversaire. C’est un piège d’être déclaré favori.  Balla Gaye 2  a été surestimé. La seule réponse que je pouvais apporter à ceux qui me qualifient de nul était de battre celui qui est considéré comme le meilleur.

Etes-vous sûr de rester longtemps au trône cette fois ?

On ne connaît la valeur du bonheur que quand on a goûté au malheur. J’ai connu cette position de roi et j’ai connu les moments de galère aussi. Maintenant que je suis revenu au royaume, je vais prendre soin de cette couronne. Il me reste 5 ans dans l’arène. Je souhaite rester invaincu jusqu’au jour ou je vais prendre ma retraite. Cela dépend de la volonté divine, mais moi aussi je vais bosser dur pour rester le plus longtemps possible sur le trône.

Avec le recul, comment expliquez-vous votre inconstance au sommet de l’arène ?

J’ai été roi des arènes à 23 ans. Je n’étais pas encore assez mature. J’étais jeune et je ne faisais que des folies. Je ne pouvais pas savoir qui me voulait du bien et qui me voulait du mal. A l’époque, je ne pouvais pas mesurer la portée du titre de roi des arènes. C’est un moment où le succès de roi des arènes rend fou. Après l’avoir perdu, plus je prends de l’âge plus je deviens conscient de mes erreurs du passé. Je suis devenu plus exigeant avec moi-même. J’accorde beaucoup d’importance à la récupération. A l’époque, je m’entraînais certes, mais je ne récupérais pas.  J’étais tout le temps avec les amis. Aujourd’hui, j’ai un régime alimentaire bien défini. A l’époque, je m’en foutais pas mal.

Est-ce qu’on peut dire que Balla Gaye 2 est tombé dans le même piège de la jeunesse ? 

Je peux dire oui parce qu’il est encore jeune. Mais je vous promets que le jour où il reprendra la couronne à nouveau, il va beaucoup changer. Il faut reconnaître que Balla est un grand champion. S’il apprend de ses erreurs, il ne sera plus facile à battre.

Est-ce que ça vous honore qu’on dise que vous avez terrassé un Balla Gaye 2 malade ?

Franchement, je suis mal placé pour parler de la maladie de Balla. Comme tout le monde, c’est à travers la presse que j’ai entendu que Balla était malade. Lors de notre dernier face-à-face, on lui a posé la question et il a dit qu’il se porte bien. Donc il ne faut pas brandir cette thèse de la maladie pour justifier la défaite. Je n’ai jamais senti un affaiblissement de sa part. Il était très fort. Il a même résisté à ma charge.

Il se dit que c’est vous qui l’avez atteint mystiquement ?

Il faut que les gens arrêtent. Balla que j’ai affronté n’a pas montré des signes de faiblesse. Il était là présent. Quand je l’attaquais, il s’est bien débattu, mais je devais le battre ce soir-là. Le mystique et la lutte vont de paire, mais le plus important c’est de travailler à l’entraînement.

Vous venez de vous donner une seconde vie dans l’arène. Quelle orientation allez-vous donner à votre carrière ?

Le sport est une question d’âge. Je me suis lancé dans la lutte très jeune. Et je suis devenu roi des arènes très jeune. Quand je suis arrivé dans l’arène, je luttais contre mes aînés. Après, j’ai affronté les lutteurs de ma génération. Mais je dois mes performances actuelles à la bonne hygiène de vie. C’est très important pour un sportif. Je connais aussi les bons systèmes d’entraînement. C’est la combinaison de tout ça qui fait que je peux être puissant jusqu’à 50 ans. Quand j’étais dans la série noire, j’ai fait beaucoup de sacrifices pour revenir de loin. La lutte à beaucoup d’aspects. Il y a les entraînements, mais aussi l’aspect mystique est à prendre au sérieux. Parfois, si on t’atteint  mystiquement tu as envie d’arrêter.

A un moment, j’ai pris le temps de me blinder mystiquement. Je suis allé dans les coins et recoins pour me préparer mystiquement. Après, j’ai amélioré mes conditions d’entraînement. Pour le reste de ma carrière, je vais ouvrir la porte aux jeunes les plus méritants. J’ai toujours souhaité que les jeunes montent pour compléter le tableau au sommet.  Ma victoire sur Balla va permettre une nouvelle redistribution des cartes et une autre configuration.

Qui souhaitez vous comme prochain adversaire ?

Je suis le roi. Je ne vais défier personne. Je vais choisir mes adversaires en fonction des propositions des promoteurs. Tous les lutteurs voudront m’affronter pour le titre que je compte bien défendre. Je suis à l’écoute des promoteurs. Si on me propose un combat alléchant, je m’engage rapidement. J’ouvre les portes à tout potentiel adversaire.

Si Yekini qui a déclaré qu’il n’allait plus lutter contre vous change d’avis pour la reconquête du trône, allez-vous accepter de l’affronter ?

Tout lutteur qui a dit qu’il ne luttera plus avec moi est écarté. Je suis prêt pour ceux qui veulent m’affronter.

Vous aviez déclaré que vous n’alliez plus affronter Tyson. Avez-vous changé d’avis maintenant que vous êtes roi ?

Si Mouhamed Ndao Tyson a envie de se mesurer à moi à nouveau, les portes lui sont grandement ouvertes. Mais s’il ne souhaite plus me croiser, on avance.

Pensez-vous accorder une revanche à Balla

S’il le désire même pour ma prochaine sortie, je suis prêt à lui accorder une revanche. Tout dépend de lui. Je ne suis pas là pour éviter des adversaires.

IDRISSA SANE

SOURCE:http://www.gfm.sn/bombardier-battre-balla-gaye-nest-pas-difficile/